My first french article about Modelling and Social media.
Hello everyone,
Today I decided to share with you, one of my analysis I did at university. This is about modelling and media and it’s in French (maybe a good start to learn it ;) ). This article related to media coverage of models through social networks, social media.
This is an ethnographic and anthropological analysis.
Good lecture/bonne lecture!
L’image que le monde du mannequinat nous renvoie est faite de clichés, de stéréotypes et de préjugés. Cependant, c’est un monde qui fait rêver, tout en étant finalement peu connu du public, un monde social que nous allons découvrir sous toutes ses coutures.
Je vais tenter de dégager les principes qui organisent le mannequinat en tant qu’activité sociale. Nous parlerons ici de la commercialisation de l’image de soi. Cette image qui est à la fois une image idéale que les autres projettent sur les mannequins et à la fois une obligation pour le mannequin de l’incarner dans des contextes relativement codifiés comme le défilé. L’acteur, le mannequin, sera la cible de cette étude qui permettra d’analyser cette communauté.
La médiatisation des mannequins pendant un défilé.
Mes observations m’ont amenée à une question, une problématique de départ : Les mannequins arrivent-ils à atteindre le stade olympien au travers des réseaux sociaux ? Chacun d’entre eux cherchent-ils à l’atteindre?
(Le stade olympien que je viens d’évoquer se réfère au texte « Les Olympiens » , repris dans le livre « L’esprit du temps » d’Edgar Morin. Les olympiens signifient les « héros de la culture de masse », ce sont des modèles pour la société. Le stade olympien est donc le stade où le succès a été atteint. )
Je possède une certaine proximité avec ce monde, mais j’ai toujours gardé une certaine réserve vis-à-vis de celui-ci. Grâce à mes contacts et à des amis mannequins, j’ai pu rentrer dans les coulisses de ce monde. Dans cet article, je vais suivre un mannequin qui fait partie de l’agence Dominique Models. B. fait, 1m90, a les cheveux blonds, yeux gris et est mannequin depuis 3 ans
Le mannequinat peut regrouper différentes activités : shootings, castings et les défilés.
Ainsi, un mannequin peut être soit indépendant, soit directement venir d’une agence de mannequinat. Qu’ils soient employés par une agence, ou qu’ils soient « freelances », les mannequins sont en contact avec le monde du mannequinat professionnel. Certains ont décidé de ne pas en faire leur activité principale. Ils poursuivent des études ou bien exercent une profession. C’est donc une activité complémentaire, voire un loisir.
Un « défilé », selon le dictionnaire Larousse, il s’agit de l’« action, pour des personnes, de passer en file ou en rang les unes derrière les autres, dans un but de démonstration, de manifestation, etc. » Pour les acteurs que nous avons suivis, c’est un show : ils se mettent dans la peau d’un mannequin. Ils ne font pas ressortir qui ils sont, ils présentent les collections de créateurs, et utilisent leur corps pour les mettre en valeur en marchant sur un podium. Les acteurs se comportent d’une certaine manière, et mettent en place « les techniques du corps », de Marcel Mauss. Sur le podium, les acteurs sont dans une interaction spécifique avec le public, par la démarche, le regard (cela dépend-il encore du genre, du style, de l’environnement du défilé ?). Quel est le sentiment qu’ils ressentent en défilant ? Un sentiment de fierté ? Je me suis posée beaucoup de questions sur leur ressenti, s’ils avaient des consignes pour défiler, s’il y avait des impératifs sociaux à suivre. Lors de mon observation, aux Brussels Fashion Days, j’ai pu découvrir l’univers des coulisses, ainsi que celui de la scène en tant qu’observatrice. Les répétitions des « shows » variaient complètement d’un jour à l’autre.
Le 15 octobre, ce furent les designers belges qui nous faisaient découvrir leurs collections, portées par les mannequins de chez Dominique Models. Le 16 octobre, ce fut le tour des écoles de stylisme de Belgique, qui mettaient en exergue les collections de leurs meilleurs étudiants. Les mannequins étaient donc choisis par les stylistes, et la plupart d’entre eux ont fait appel à des proches, peu importe les mensurations de la personne.
Je vais me concentrer premièrement sur la journée du 15 octobre, lors de laquelle j’ai eu la chance de suivre B. dans les coulisses. C’était un défilé des collections réalisées par des stylistes belges, qui ont fait appel à des mannequins d’une agence réputée (Dominique models). Je m’attendais à trouver des mannequins de différentes agences, mais ce ne fut pas le cas, la notoriété de Dominique models, selon les organisateurs, signifie un gage de qualité, de sureté. J’ai eu le ressenti qu’ils me parlaient d’un produit de consommation.
La répétition du show s’est fait rapidement, tout le monde avait la bonne démarche, la bonne attitude. Il y avait 15 filles et 8 garçons, l’âge variait de 15 ans à 27 ans. Après la répétition, je suis allée dans les coulisses. Pourquoi est ce qu’aujourd’hui, temps libre signifie-t-il temps médiatique ? Je veux dire par là : pourquoi les mannequins en attendant de défiler, sont continuellement en contact avec leurs réseaux sociaux ? Comme s’ils avaient besoin de pouvoir maîtriser constamment leur image.
Quatre heures d’attente plus tard, la moitié des mannequins n’étaient pas encore passés au MUA (Make-up & hair. Je me suis donc dirigée vers la « salle » de maquillage. Ambiance électrique ! Pendant ce temps d’attente, ils scrutent les réseaux sociaux : Snapchat, Instagram, Facebook, Messenger etc. Un selfie ici et un autre là, leur communauté vit en direct la vie stéréotypée du mannequin à travers un écran et une manière de se mettre en scène qui participe à la création du stéréotype. Un selfie est repris au minimum 3 fois pour qu’il soit correct et est envoyé instantanément à leur réseau. Une fois la photo prise, le mannequin en reprend une pour Instagram. Selon B., la présence sur Instagram est primordiale, c’est comme un « book » en ligne, jugé par le nombre de followers (« suiveurs »/abonnés). J’ai donc questionné un scouter, un scouter désigne une personne qui repère les mannequins dans la rue et qui travaille dans l’agence, on peut également l’appeler agent ou booker.
Lors de mon interview chez Dominique Models, un agent m’a fait part qu’un mannequin qui a 22.000 abonnés sera plus souvent « booké » qu’un mannequin qui en a 200. Cela permettra au photographe qui le « book » d’acquérir aussi de la notoriété car son modèle est « connu ». J’ai également ressenti une relation de pouvoir entre le « booker » et le mannequin, c’est grâce à eux que les mannequins sont mis en avant. B. m’a fait part de l’importance de la qualité relationnelle entre l’agence et le mannequin. Selon, Ashley Mears et Frédéric Godart, c’est grâce aux employés de l’agence qui font de la publicité pour le mannequin, qu’ils auront plus de reconnaissance et de travail.
De plus, on peut distinguer, parmi les autres mannequins, ceux qui tentent de réussir en tant que mannequin dans la vie professionnelle, via des démarches professionnelles, et ceux qui essayent de le faire au travers des réseaux sociaux. J’ai remarqué que le poids de la société a une certaine importance. Selon B, les mannequins veulent imiter les mannequins célèbres, les acteurs connus du business.
Y a-t-il un certain conformisme sociétal dans la façon de prendre des photos, de mettre des hashtags sur Instagram (qui désigne un domaine particulier, pour exemple #model, #work) de poser, de s’habiller ?
D’après Marcel Mauss, il y a des formes d’imitation dans la société, sur lesquelles nous reviendrons.
S., aussi présent aux Brussels Fashion days, est mannequin également, il ne suit pas les recommandations des agents (bookers, scouters). Son instagram, ouvert au public, ne montre pas de photos de lui, dénudé ou des photos types pour magazines. Ce sont simplement des photos qu’il veut partager, des photos de ses amis, de ses proches, il n’a pas la volonté d’être « reconnu ». Mais si on le compare à G., S. obtient nettement moins de travail. G. a 17 000 followers/abonnés sur Instagram. On y retrouve des selfies, des photos de lui au sport torse nu. Grâce à son Instagram, il attire les clients (bookers, photographes, stylistes, entreprises) et c’est principalement par ce réseau qu’il obtient du travail. D’après mon ressenti personnel, G. me paraissait fermé aux autres, il m’a fait part en toute honnêteté, qu’il préférait s’entourer de belles personnes (physiquement parlant). Il fait sa publicité et attire les photographes par son physique. Il a déjà voyagé dans le monde pour de nombreux défilés, selon lui, il a réussi et il a atteint son but. Être reconnu, continuer à acquérir de la notoriété pour s’élever dans le monde du mannequinat.
Deux semaines plus tard, les photos du défilé du Brussels Fashion Days sont apparues sur la page Facebook, les mannequins n’ont pas hésité à les faire partager. Grâce à cette notoriété, B. s’est vu proposer un défilé par le coiffeur qui s’était occupé de lui.
Le 16 octobre, ce fut les défilés des diplômés des écoles de stylisme. J’ai également pu voir les répétitions. Chaque équipe de mannequin qui représentait un diplômé répétait de deux à cinq fois sur la scène avant d’être approuvé par le metteur en scène. Celui-ci était bien moins exigeant que le jour précédent. Par contre, les collections des stylistes étaient plus extravagantes et plus impressionnantes que celles des designers belges. Lorsque je suis allée dans les coulisses avec mes coéquipiers, nous avons pu remarquer une ambiance décontractée, moins de stress, et plus de convivialité même si on peut apercevoir un peu de concurrence chez les filles. Je me suis également sentie plus à l’aise. Ce jour-là, les mannequins variaient, ils étaient petits, grands, minces, ronds, roux, bruns, blonds. J’ai pu remarquer autant de Smartphone que le jour précédent, et autant de selfies.
Les « mannequins amateurs » rencontrés aux Brussels Fashion days, sont également fort présents sur les réseaux sociaux. Ils possèdent exactement les mêmes ambitions que G, B, S : se faire repérer sur les réseaux sociaux en tant que modèle. Les Smartphones étaient plus présents que le jour précédent, ils se comparent aux mannequins, ils partagent leurs expériences avec leurs réseaux par des selfies, des story de snapchat (courts films de 10 secondes qu’ils peuvent partager sur leur profil), des photos sur Instagram et Facebook.
Un mois plus tard, le 12 novembre, j’ai eu la chance d’assister et de voir les coulisses du défilé « Customisez-moi » en partenariat avec Guerlain et le « Elle magazine ». B. y participait gratuitement, dans le but d’acquérir de l’expérience et de découvrir de nouvelles personnes. Le défilé était un concours qui présentait les collections de jeunes stylistes belges. Ils avaient pour but de customiser des vêtements, en utilisant leur créativité et leur originalité. Il y avait 10 stylistes âgés de 19 à 23 ans, tous étudiants, dont seulement deux allaient être les vainqueurs du concours. Les gagnants ont obtenu des chèques de 1000 euros, des shootings et une page dans le magazine Elle.
Lors de cet évènement, j’ai pu rencontrer de nombreux stylistes, journalistes, organisateurs, mannequins et à la fin de chaque conversation, ils m’ont demandé mon nom de famille pour me retrouver sur Instagram ou Facebook. Ils m’ont fait part de leurs expériences et de leurs connaissances pour m’aider dans l’analyse de mon terrain ethnographique. La convivialité et la sociabilité de l’évènement m’ont agréablement surprise et ont transformé mes préjugés de départ. Dans les coulisses, je n’ai pas ressenti de concurrence, les mannequins s’aidaient entre eux à se préparer, ils prenaient des selfies entre eux.
Les médias ont clairement une influence considérable sur le monde de la mode, c’est à travers les médias que nous avons accès aux différentes facettes et coulisses de ce monde qui est souvent perçu à travers des clichés.
J’ai interviewé mes proches sur les visions de ce monde, beaucoup pensent que c’est un monde nombriliste, superficiel, dans lequel le physique est tout ce qui compte. A travers mon analyse et après le temps que j’ai pu passer avec les mannequins, j’ai remarqué qu’en effet, il y a ce coté « sûr de soi », qu’ils doivent posséder. Un mannequin manquant de confiance en lui, verra t-il son anxiété se refléter dans les yeux du public ? Sur les photos, un regard fuyant plutôt qu’un regard direct, droit se remarquera t-il ? Le public sentira-t-il le mal-être ?
Les médias ont également une influence sur la confiance en soi. Instagram permet de se créer une identité à travers des photos qui sont souvent « filtrées », ou « retouchées », dans le but de se dire qu’au final, on est proche des photos des mannequins de Victoria’s Secret.
De plus, notre photo secrètement retouchée qui paraît parfaite à nos yeux, acquerra de la notoriété. Le public d’Instagram aime les jolies photos, les photos qui montrent quelque chose. Au final, comment atteindre le succès à travers une identité digitale qui peut être faussée par les filtres, par des images retouchées qui ne montrent qu’une réalité probablement faussée ?
Notre société vit-elle aujourd’hui à travers les réseaux sociaux ?
Mes observations m’ont permis de généraliser, de re-théoriser mes hypothèses, mes questionnements et de découvrir et comprendre ce monde qui m’a agréablement surprise. Dans notre société actuelle, les médias jouent un rôle important dans l’identité numérique. Les mannequins construisent leurs réseaux en fonction des différentes expériences effectuées, des différentes relations qu’ils possèdent. Pour prendre soin de ce réseau, il faut prendre soin de notre image. Les relations doivent être entretenues entre agents, mannequins et clients. Les médias ont une importance prépondérante, Instagram et Facebook sont les deux réseaux indispensables dans la gestion de l’image du mannequin.
En effet, selon Ashley Mears et Frédéric Godart, «… Considérés comme des gardiens, les agents restreignent l’accès aux auditions à quelques candidats triées sur le volet (…), l’apparence d’un mannequin est une question de goûts particuliers et d’évaluations individuelles de sa beauté physique selon le choix des agents ». Les agents sont subjectifs lorsqu’ils présentent des mannequins aux entreprises. Ensuite, « ils entraînent et socialisent les mannequins afin qu’elles correspondent aux critères physiques et de personnalité requis avant le début des défilés ». Ils ont donc une influence considérable dans la montée du mannequin vers le stade Olympien. Les agents sont en contact régulier avec les producteurs, les clients.
« Les producteurs valorisent l’échange d’informations avec d’autres producteurs dans leur réseau social, simplifiant un processus de décision incertain des mannequins pour les défilés. D’abord, malgré les discours des producteurs sur les goûts personnels, nous avons expliqué que leurs choix sont encastrés dans des réseaux sociaux à travers un mécanisme de partage d’informations, un mécanisme similaire à l’« effet d’entraînement » (« bandwagon effect ») des économistes (Leibenstein, 1950). L’appartenance des producteurs à des réseaux sociaux (par exemple urbains ou organisationnels) influence leurs choix (…). Les producteurs dans l’industrie de la mode sont très actifs dans leurs stratégies de « réseautage », au sein de leur organisation ou même au-delà. Ils sortent régulièrement ensemble et interagissent souvent lors de soirées ou autres événements ».
On peut tirer une première conclusion : plus les mannequins entretiennent de bonnes relations avec les clients (producteurs, agents, stylistes, photographes), plus ils seront conviés à des activités hors « mannequinat ». Plus ils connaîtront des personnalités du milieu, et plus ils acquerront de la notoriété donc du travail et donc du succès. Je peux donc remettre en doute ma problématique : les réseaux sociaux ne sont pas les seuls moyens pour atteindre le stade olympien mais, être au bon moment et connaître les bonnes personnes, est un atout !
En deuxième lieu, en voulant imiter les stars, les mannequins grâce à ce mimétisme, attirent le public sur les réseaux. Au sens de Marcel Mauss dans « Les techniques du corps », « L’imitation a aussi des conséquences sociales à plus long terme dans la mesure où nous incorporons des gestes, des postures corporelles, imitées ou reprises à d’autres qui nous ont servi de modèles. Ces gestes, ces attitudes, ces postures finissent par devenir des habitudes qui constituent de façon relativement stable ce que nous sommes socialement, notre identité sociale. En fait, nos moindres comportements (…) sont imprégnés des façons de faire des modèles que nous imitons (…)».
Donc, les mannequins suivent une mode, des façons de faire de modèles qui ont atteint le stade Olympien. L’homme naturellement pratique le mimétisme, les mannequins imitent, qu’ils soient amateurs ou professionnels, ils visent un idéal inspiré de leurs modèles.
Troisièmement, et finalement, d’après Edgar Morin et son texte « Les Olympiens », « Le rôle qu’ils jouent les promeut. Leur visibilité les « déifie ». La presse les transfigure : « l’olympisme des uns naît de l’imaginaire, c’est-à-dire des rôles incarnés dans les films (les stars), l’olympisme des autres naît de leur fonction sacrée (royauté, présidence), de leurs travaux héroïques (champions, explorateurs), ou érotiques (playboys) » (p. 139). Ils s’imposent par la glorification de leur propre image, attirent par leur exceptionnalité, focalisent d’interminables commentaires sur leurs plus simples gestes ou expressions ».
Les mannequins qui cherchent à atteindre le stade Olympien, se trouvent peut-être dans une illusion. Ils peuvent y arriver via les réseaux sociaux, mais peuvent-ils y arriver réellement ?
Finalement, je ne crois pas que les réseaux sociaux, l’identité digitale permettent au mannequin de réussir dans la vie et d’être un « Olympien ». Certes, notre identité digitale aide à montrer qui nous sommes virtuellement et de nous faire une « carte de visite », mais la volonté, la personnalité, le réseau sont des atouts qui, je pense, permettent d’aller plus loin que le fait de posséder 20.000 abonnés sur Instagram.