[FR] A quel point devons-nous arrêter de dissocier l'artiste de l'individu dans le monde des jeux vidéo?

in #gaming6 years ago

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Source: Tigerfog

Salut tout le monde. Ici Klebs et aujourd’hui, j’aimerais me pencher sur la controverse autour de certains membres de l’industrie du jeu vidéo et tenter de voir si c’est juste de boycotter leurs produits au détriment des autres personnes qui ont aussi travaillé dessus.

Quand j’étais plus jeune, j’étais assez innocent pour apprécier toute forme de divertissement sans me soucier de la vie personnelle des créateurs. Aujourd’hui avec l’accès facile aux nouvelles sur Internet, c’est rendu plus difficile d’ignorer les frasques de certains au point où je me suis déjà demandé si je devrais me sentir coupable de permettre à certains individus de continuer à vivre de leur art même s’ils ont commis des actes entrant en contradiction avec mes valeurs. Dans cet article, je vais m’attarder seulement aux professionnels de l’industrie du jeu vidéo dont je suis familier avec et qui ont eu un impact positif avec leurs jeux tout en suscitant des controverses avec leurs actes ou leurs déclarations. Si j’ai passé par-dessus certains individus qui méritent d’être mis de l’avant, je vous inviterai à en discuter dans les commentaires.

Une petite note avant de commencer: j’ai personnellement acheté des jeux créés par les individus cités dans cet article avant d’avoir appris tout ce que je vais raconter.

Ron Gilbert & Tim Schafer

Comment se sont-ils démarqués dans le monde des jeux vidéo?

Durant leur temps chez LucasArts (anciennement LucasFilm Games), Ron Gilbert et Tim Schafer ont grandement contribué à la popularité des jeux d’aventures graphiques de type “point-and-click” durant les années 80 et 90 notamment avec l’engin SCUMM (Script Creation Utility for Maniac Mansion) rendant les jeux plus intuitifs et facile à jouer où les joueurs pouvaient entrer des commandes en combinant un verbe avec un objet à l’aide de la souris au lieu de tout entrer au clavier comme les premiers jeux Sierra. Alors qu’ils ont travaillé ensemble sur des succès comme les deux premiers Monkey Island et Day of the Tentacle, chacun a aussi bâti sa propre réputation avec des titres comme Maniac Mansion, Zak McKracken, The Cave et Thimbleweed Park pour Ron Gilbert et Full Throttle, Grim Fandango, Psychonauts et Broken Age pour Tim Schafer.

Source: GameSpot Trailers

Source: GameSpot Trailers

D’où vient la controverse?

En 2014, un mouvement nommé Gamergate a divisé la communauté des gamers en deux. D’un côté, ceux qui y sont favorables (pro-Gamergate) disent qu’ils veulent plus de transparence chez les journalistes des jeux vidéo en dénonçant les collusions entre ces derniers et les créateurs de jeux. De l’autre côté, ceux qui s’y opposent (anti-Gamergate) disent qu’ils veulent l’égalité des sexes et une meilleure représentation des minorités visibles dans une industrie misogyne ciblant une clientèle majoritairement masculine et d’origine occidentale. Appartenir à un camp du mouvement s’apparente à appartenir à un parti politique: vous êtes soit avec eux, soit contre eux et le camp adverse est toujours démonisé à l’extrême. Certains créateurs de jeux ont pris position dans ce mouvement dont Ron Gilbert et Tim Schafer qui n’ont jamais caché leur amitié envers Anita Sarkeesian, une féministe connue avec autant d’admirateurs que de détracteurs et qui s’exprimait régulièrement contre le mouvement. Ron Gilbert avait déjà invité ses abonnés sur Twitter à arrêter de le suivre s’ils avaient un problème avec son amie anti-Gamergate et lors d’un discours, Tim Schafer s’était ouvertement moqué du sous-mouvement “#NotYourShield” suivi par des femmes et des personnes d’origine non-occidentale qui clamaient que les membres anti-Gamergate ne parlaient pas en leur nom. En prenant position contre le mouvement, Ron Gilbert et Tim Schafer ont gagné le respect de certains fans tout en perdant d’autres qui se sont engagés à boycotter leurs jeux.

Paul Trowe

Comment s’est-il démarqué dans le monde des jeux vidéo?

Paul Trowe avait commencé à travailler pour Sierra dès l’âge de 12 ans en tant que testeur et avait progressivement gravé les échelons. Lorsque Sierra a fait faillite et vendu ses propriétés intellectuelles à divers acheteurs, il a tenté de les racheter à travers sa compagnie Replay Games afin de ressusciter certaines franchises inactives depuis plusieurs années. Lorsqu’il avait réussi à acheter la licence pour refaire le premier jeu de la série Leisure Suit Larry et convaincu Al Lowe, le créateur original de la série et Josh Mandel, un ancien concepteur et scénariste des jeux Sierra de joindre son équipe, les fans ont montré leur support en donnant leur argent au projet sur Kickstarter qui a dépassé son but initial. Plusieurs voyaient Paul Trowe comme le rassembleur qui avait réussi à se bâtir l’équipe de rêve pour faire découvrir Leisure Suit Larry à une nouvelle génération de gamers et même si la phase de développement ne s’est pas faite sans histoire, ce jeu a pu être complété et publié, un objectif que pas tous les projets Kickstarter ont pu atteindre.

Source: Wikipedia

D’où vient la controverse?
Bien qu’il ait réussi à mener le projet à terme, son comportement sur Twitter durant la phase de développement en a froissé plusieurs. Entre ses attaques envers des anciens employés de Sierra qui ont décidé de raviver une vieille franchise sans lui, sa description détaillée et publique du congédiement d’un studio de développement qui avait pourtant contribué au succès du projet sur Kickstarter, ses menaces de poursuivre en justice des créateurs derrière un projet Kickstarter dont Al Lowe était brièvement impliqué et le fait qu’il ait publiquement sorti une transexuelle du placard, il manquait aussi rarement l’occasion d’attaquer les gens qui le critiquaient sur Twitter. Même si son comportement pouvait être excusé, se retrouver devant les tribunaux pour avoir montré à une adolescente une vidéo de deux hommes ayant des rapports sexuels sous prétexte que l’un d’eux était son petit ami est une toute autre histoire. Résultat: Al Lowe et Josh Mandel ont mis fin à leur association avec Paul Trowe et le prochain jeu, Leisure Suit Larry: Wet Dreams Don’t Dry est actuellement en cours de développement mais aucun des trois n’est impliqué dans ce projet.

Philippe Poisson alias Phil Fish

Comment s’est-il démarqué dans le monde des jeux vidéo?

Phil Fish avait travaillé pendant cinq ans sur Fez, un jeu supposément en 2D mais où le joueur pouvait changer d’angle donnant ainsi un aspect 3D à la jouabilité. Les derniers mois de la phase de développement du jeu ont été montrés dans le documentaire Indie Game: The Movie où Phil Fish s’exprimait sans se retenir permettant au public de voir à quel point la vie d’un créateur de jeu vidéo n’est pas de tout repos et que le prix à payer pour mener le projet à terme est souvent très élevé (rupture, dette, critique d’un public frustré que le jeu tarde à être publié, menace de poursuite d’un ancien collaborateur, etc.). Malgré sa personnalité plutôt colorée, Phil Fish attirait la sympathie de certains qui souhaitaient qu’il réalise son rêve de publier un jeu malgré tous ces obstacles. Une fois complétée, Fez a été un gros succès et a remporté beaucoup de prix tant avant qu’après sa sortie sur Xbox 360 en 2012 et les autres consoles et ordinateurs les années suivantes.

Source: GameSpot Trailers

D’où vient la controverse?

Publier Fez n’a pas fait grand chose pour calmer Phil Fish qui, comme Paul Trowe, manquait rarement une occasion de répondre à ses détracteurs sur Twitter et sa façon d’exprimer ses opinions n’a pas aidé non plus comme dire à un développeur japonais “vos jeux sont juste pourris” ou déclarer que ceux qui mettaient des vidéos sur YouTube d’eux jouant à Fez devraient lui verser un pourcentage des revenus générés. Pour mettre fin à sa carrière dans l’industrie des jeux vidéo, Phil Fish a déclaré sur Twitter: “Fez II est annulé. Je prends l’argent et je m’en vais.” et il s’est fait plus discret depuis.

Pouvons-nous vraiment continuer à acheter leurs jeux basés sur ces informations?

Au début, j’étais prêt à boycotter les jeux créés par certaines personnes qui se sont mal comportées selon moi. Dans ma petite tête, je pensais qu’arrêter d’acheter leurs jeux et passer le mot aux gens autour de moi allait envoyer un message aux créateurs que je n’allais pas les aider à s’enrichir. Le fait que j’allais punir tout un studio avec plein d’employés innocents à cause d’une personne ne m’avait pas traversé l’esprit. Cependant, mon attitude a changé au fil des années à l’aide des vidéos “making of” des jeux comme Uncharted ou Broken Age qui m’ont rapidement rappelé que faire un jeu est un travail d’équipe et que ce n’est pas seulement injuste mais aussi cruel de ne pas récompenser les individus qui ont travaillé si fort pour offrir aux joueurs des heures et des heures d’expérience inoubliable à cause d’une personne. C’est pour ça que la prochaine fois que l’envie me viendra de boycotter un jeu, je me rappellerai que c’est une équipe qui crée un jeu, pas un individu.

Tout ceci n’est que mon opinion à moi, Klebs. Et vous? Qu’en pensez-vous? Etes-vous du genre à boycotter un produit basé sur le comportement d’un individu? Discutons-en dans les commentaires.

Si vous avez aimé cet article, n’hésitez pas à l’upvoter et le resteemer et pour être au courant des futures publications, suivez-moi sur Steemit. Merci d’avoir lu et à la prochaine.

Sort:  

Quand j'achète un jeu vidéo, c'est pour son contenu et pas pour la personne derrière, pour moi c'est aussi simple que ça. Si un jour Edmund McMillen (aka mon créateur de jeu préféré) sort un des jeux les plus nuls au monde, je ne l'achèterai pas. Du coup, j'ai cette même logique dans le sens inverse, ce qui fait que je n'aurais aucun mal à acheter un jeu d'une personne que je n'aime pas. Tant que le jeu m'intéresse, le reste ne m'importe pas. Si j'adore un jeu par contre, je vais chercher à en savoir plus sur ses développeurs. Si ce sont de sombres abrutis c'est dommage mais ça ne m'empêchera en rien d'acheter leur prochain jeu.

Après je suis curieux de savoir la position que tu prendrais si un jeu était réellement créé par un seul individu (c'est rare mais ça existe bel et bien!). Ah et super post d'ailleurs, dommage que j'arrive trop tard pour que mon vote aie de la valeur...

Merci pour ton opinion très détaillé @ragepeanut. En effet, j’ai mis du temps à changer mon opinion mais je suis rendu à un point où je suis d’accord avec toi: si le jeu est excellent mais que le développeur qui a travaillé dessus est une crapule de la pire espèce, ça ne m’empêchera plus de l’acheter car je veux encourager l’équipe entière, pas juste une personne.

Par contre, si le jeu a été conçu, développé, illustré, composé et distribué par vraiment un seul individu et que je ne l’aime pas, j’aurai moins de difficulté à aller voir ailleurs. Dans mon cas personnellement, ce choix n’est pas trop difficile car au fil des années, ma pile de jeux à jouer n’a fait qu’augmenter au lieu de diminuer car je m’intéresse aux jeux des années 80 jusqu’à aujourd’hui aussi bien sur console que sur ordinateur.

Edmund McMillen est ton créateur préféré? Il va falloir que j’essaie son jeu The Binding of Isaac alors. Tigerfog l’a sur Switch et il me l’a recommandé donc je l’essaierai éventuellement.

Je suis un peu dans le même cas que toi pour ce qui est de ma pile de jeux qui grandit plus vite que le nombre de jeux auxquels je joue, même si dans mon cas c'est plutôt à cause de tous les nouveaux jeux indépendants qui sortent jour après jour.

Edmund McMillen c'est LE créateur de jeux qui a le plus influencé mes choix de vie. J'avais même fait un post dédié à lui (que tu peux voir en cliquant ici) à l'époque pour faire découvrir certains de ses jeux moins populaires. Les jeux fait par Edmund McMillen se reconnaissent à des kilomètres. La première fois que j'ai vu le trailer de The End Is Nigh j'ai tout suite su que c'était de lui, il a une patte artistique et un univers bien à lui qu'il emporte dans tous les jeux qu'il crée. Il y a d'autres développeurs / studios que j'admire (Tomorrow Corporation, Double Fine Productions et Jonathan Blow pour en citer quelques uns) mais Edmund McMillen est et restera toujours au-dessus à mes yeux.

The Binding of Isaac est un de ses jeux à absolument essayer, ce n'est pas mon préféré parce que je préfère les platformers mais il reste excellent. Sinon il y a le classique Super Meat Boy et le plus récent The End Is Nigh qui sont aussi bons l'un que l'autre.

J’ai lu ton article sur Edmund McMillen et je l’ai trouvé très intéressant. Tigerfog m’a fait essayer The Binding of Isaac sur Switch et Super Meat Boy sur PS Vita et j’ai eu beaucoup de fun avec, surtout Super Meat Boy où quand tu complètes un niveau, tu vois toutes tes tentatives de le finir rejouer simultanément sous tes yeux.

Je ne sais pas pour toi mais c’est dans le documentaire Indie Game: The Movie que j’ai découvert Edmund McMillen, Jonathan Blow et le controversé Philippe Poisson (Phil Fish). Je peux te dire après avoir brièvement travaillé dans un studio de jeux vidéo que ce n’est pas tous les Québécois qui sont comme ce gars-là.

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Il est vrai que l'on accorde peu de crédit à ce qui se passe en coulisse lors de la confection d'un jeu. Avant de porter un jugement trop hâtif, ayons une pensée envers tous ces hommes et ces femmes qui ont travaillé dur pour nous proposer nos titres favoris.

Entièrement d'accord.

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